Induction de la spermatogenèse : aspects moléculaires et thérapeutiques
J. Young*a (Pr)
a Univ. Paris-Sud, APHP et INSERM U 1185, Hôpital Bicêtre, Le Kremlin Bicêtre, FRANCE
* jacques.young@aphp.fr
Dans l’espèce humaine la production testiculaire de spermatozoïdes, qui assure la perpétuation de l’espèce, apparait à partir de l’âge de la puberté. Elle est sous le contrôle des gonadotrophines hypophysaires FSH et LH. FSH exerce son rôle physiologique testiculaire grâce à son récepteur membranaire (FSHR) exprimé à la surface des cellules de Sertoli (CS) depuis la vie fœtale. Un des effets essentiels de FSH est de stimuler les la multiplication des CS et de déclencher une signalisation cellulaire impliquant l’AMPc qui induit des effets paracrines stimulant les cellules germinales adjacentes (spermatogonies). LH a un effet stimulateur sur la spermatogenèse qui est indirect. Cette gonadotrophine assure la stimulation directe des cellules de Leydig (CL) via son récepteur membranaire LHR exprimé à leur surface. LH stimule la stéroïdogenèse des CL assurant ainsi la production de testostérone testiculaire (TT). La TT va agir de façon paracrine sur les tubes séminifères grâce au récepteur nucléaire aux androgènes (RA) qui est exprimé dans les CS mais seulement quelques années après la naissance. L’induction pubertaire d’une spermatogenèse quantitativement et qualitativement normale nécessite l’effet stimulateur concomitant de LH et de FSH donc une intégrité de l’axe gonadotrope. Ceci a été clairement démontré grâce à des modèles pathologiques humains (mutations des sous-unités spécifiques de LH et de FSH) montrant que la perte d’une seule des gonadotrophines empêchait l’apparition de spermatozoïdes. Cette nécessité d’action concomitante des deux gonadotrophines a aussi été renforcée par des essais thérapeutiques sur des patients avec déficit complet et concomitant des deux gonadotrophines (hypogonadisme hypogonadotrophique, HH). Chez ces hommes avec HH sévère (volume testiculaire <3 mL) ni la FSH ni l’hCG (gonadotrophine chorionique, hormone à activité LH >> à LH hypophysaire) administrées isolément pendant plus d’un an ne permettent d’induire une spermatogenèse. La conséquence thérapeutique est que chez les hommes avec HH sévère les deux gonadotrophines doivent être administrées simultanément pour obtenir une production optimale de spermatozoïdes. Le cas particulier des HH partiels sera aussi discuté.
Au plan mécanistique, la nécessité absolue pour induire la spermatogenèse d’une stimulation simultanée des CS et des CL testiculaire n’est pas bien comprise. Pourquoi chez l’homme (à la différence des rongeurs) l’effet LH/hCG indirect ne peut pas être remplacé par la simple adjonction de testostérone exogène à un traitement par FSH ? Différentes hypothèses mécanistiques et moléculaires seront discutées. Leur connaissance précise permettrait de mieux comprendre la physiologie de la spermatogenèse pour intervenir plus efficacement aussi bien en fertilité qu’ en contraception masculine. Un autre point incompris en physiologie humaine masculine est l’absence d’induction de la spermatogenèse chez le fœtus et le nouveau-né. En effet, en fin de vie fœtale et pendant les premiers mois de la période post-natale il existe une activation importante de l’axe gonadotrope et des fonctions testiculaires endocrines. Cependant aucune spermatogénèse n’est détectée (même histologiquement) malgré cette double stimulation physiologique des CS et des CL et la présence documentée de cellules germinales. La résistance élective du testicule exocrine pendant ces stades précoces du développement sera discutée. L’ontogenèse du RA et des facteurs modulant son expression au sein des CS semble jouer un rôle important.
L’auteur n’a pas transmis de déclaration de conflit d’intérêt.